lundi 3 mai 2010

Amateurs vs professionnels

Je suis présentement en train de lire The Dumbest Generation Ever, de Mark Bauerlein (réflexion sur ce livre à venir). Cette lecture fait suite à celle de The Cult of the Amateur, de Andrew Keen. Deux excellents livres sur l'utilisation des multimédias par les jeunes, pas nécessairement l'utilisation pédagogique, mais l'utilisation générale. Keen fait le point que le Web 2.0, étant donné la facilité avec laquelle les utilisateurs peuvent créer du contenu, promeut l'amateur, du moins l'information créée par celui-ci, au profit de celle créée par l'expert. Je dois admettre qu'à mon avis, il n'a pas tout à fait tort. L'exemple le plus souvent cité dans le livre pour illustrer ce point est celui de Wikipédia. Lors de l'édition d'un article de Wikipédia, toutes les modifications sont traitées de manière égale, qu'elles soient faites par un élève du secondaire ou par une sommité. Bien que les modifications apportées par l'élève du secondaire peuvent être des plus pertinentes, il est intéressant de constater que son mot est aussi important que quelqu'un qui est reconnu comme étant un expert mondial en la matière (Keen présente un bon exemple dans son livre aux pages 42-43).

Cette égalité, qui est la pierre angulaire de Wikipédia (contrairement à Citizendium), ne devrait probablement pas être. À la limite, je considère que cette égalité peut être comparée à donner un poids égal à une recommandation d'un médecin et d'un voisin. Malgré que l'opinion de votre voisin peut-être réfléchi, et valable, celle du médecin est (on l'espère!) est fondé sur des années d'études du sujet en question. Or, il est important de faire la différence entre l'avis d'un novice et d'un expert. Cependant, il est difficile de le faire étant donné la nature anonyme de l'Internet. Toutefois, les règles de Wikipédia stipule que tous les faits mentionnées dans un article doivent être vérifiés et vérifiables en plus d'adopter un point de vue neutre sur le sujet.

Ce culte de l'amateur entre en compétition avec les grands médias, selon Keen, car certains vidéos publiés sur YouTube par des amateurs sont aussi sinon meilleurs que ceux des professionnels. Qui plus est, puisque l'Internet est anonyme de nature, il est difficile de savoir qui a réellement créé l'information (vidéo, blogue, etc.). Il recense plusieurs cas de blogues et de vidéos qui promouvaient certains produits ou idées sans toutefois mentionner les liens commerciaux entre l'auteur de l'information et la compagnie qui vend le produit ou le service. Cet anonymat devrait forcer l'auditeur ou le lecteur à avoir un regard critique sur tout ce qui vient du Web 2.0.

Une grande différence entre les deux médias, amateur et professionnel, est la responsabilité des derniers, toujours selon Keen. Les journalistes qui publient dans les médias traditionnels ont un code d'éthique à suivre et son responsable des informations qu'ils publient. S'ils publient des faussetés, ils peuvent être poursuivis. Cette éthique et cette responsabilité juridique forcent les journalistes à vérifier et poser un regard critique sur l'information qu'ils obtiennent. Les blogueurs (dont je fais partie) et autres participants du web 2.0, quant à eux, n'ont pas cette responsabilité juridique envers la société. Les blogueurs ont bien la responsabilité morale, pour ce que ça vaut.

Comment tout ceci est relié-il au monde de l'Éducation ? Avant d'intégrer les outils du Web 2.0 dans notre salle de classe, il est important de savoir s'en servir et de faire réfléchir les élèves sur l'utilisation de ceux-ci. Il faut les éduquer sur l'utilisation de l'information retrouvée sur Internet, car la plupart, toujours selon Keen, ne sont pas capables de poser un regard critique sur celle-ci. Je crois que le Web 2.0 déborde d'outils qui ont un potentiel pédagogique énorme. L'important pour un enseignant est de comprendre que ces outils sont des moyens d'apprentissages et non la fin de l'apprentissage. Il faut mettre l'élève en situation d'apprentissage de sorte qu'il puisse utiliser ces outils pour construire ses savoirs comme on utilise un marteau pour construire une maison. L'objectif d'utiliser un marteau n'est pas d'apprendre à clouer, mais plutôt de permettre la construction d'un objet. L'outil doit permettre à l'élève de développer ses savoirs, non pas à développer ses connaissances de l'outil (qui sont toutefois préalable à la création des savoirs).